Du gros, du grand, du Grangé.

Grangé

Rentrée littéraire 2015. Cette fois-ci, c’est l’Homme-Clou*. Terrifiant tueur dans les années 70. Il sévissait dans le Bas-Congo. Il avait pour délicatesse artistique de planter des clous dans les épaules et les joues de ses victimes, des morceaux de verre dans leurs corps, des bouts de miroir dans leurs yeux. Ils devenaient ainsi des minkondi – qui protègent du mal, des malédictions. Il devint le nganga blanc. Et fut arrêté par un flic barbouzard. Puis conduit chez les fous, quelque part en Bretagne. Et voilà que quarante ans plus tard, un corps est retrouvé. Mort. Planté, plutôt. Avec des clous. Puis un deuxième. Un troisième. Pendant 777 pages, Grangé joue avec nos nerfs comme il l’avait si bien fait dans avec ses deux premiers romans**. Sa fabuleuse écriture minérale s’insinue en nous, comme du mercure. Nous hypnotise. Et nous offre, au hasard des pages, d’authentiques pépites.
Et si Lontano est un thriller cruel (ici, les scènes de crimes ridiculisent 99,99% de celles des séries policières), il est surtout l’histoire d’une famille brisée. De liens déchirés. Et il me semble que, plus il écrit, plus Grangé exprime son chagrin des âmes qui se sont perdues, sa souffrance des êtres humains qui se sont égarés. Plus ses héros sont inhumains, plus Grangé est humain. De cette humanité qui fait les vrais écrivains.

*Lontano, Jean-Christophe Grangé. Éditions Albin Michel. En librairie depuis le 10 septembre 2015.
**Le vol des cigognes, à (re)découvrir d’urgence, et Les Rivières Pourpres, au Livre de Poche, comme tous les autres, d’ailleurs.