Envole-moi.

Philippe Vasset Rentrée littéraire 2018. Le hasard est parfois bien malicieux. Après nous être penchés sur Le malheur du bas (chronique ci-dessous), levons les yeux vers Une vie en l’air*, l’histoire hypnotisante d’une hantise ; un récit envoutant, comme le fut pour moi Le sens du calme de Haenel, autour du rêve raté de Jean Bertin : les dix-huit kilomètres de rail suspendu dans la Beauce pour son projet d’aérotrain qui établit en 1974 un record du monde de vitesse sur coussin d’air (430 km/h). C’est là, à sept mètres de hauteur que va habiter Philippe Vasset, et surtout se laisser habiter par cette « ruine du futur », cette très longue et curieuse frontière, régulièrement taguée à l’attention des voyageurs en train, cette ligne de béton entre ciel et terre, cette mémoire de nous, cette impuissance magnifique ; et Vasset va en sortir ce récit absolument inclassable et beau, cette envolée qui nous fait nous voir si petits, si grands, si vains parfois, tellement engoncés dans des lieux que nous n’habitons finalement pas, car, comme il l’écrit page 185 : Habiter, comme écrire, c’est travailler une énigme. Il en pose une, sublime.

*Une vie en l’air, de Philippe Vasset. Éditions Fayard. En librairie depuis le 27 août 2018. Sur la première liste du Prix Femina et du Prix du Style.