« Je chante un baiser osé/Sur mes lèvres déposé ».

Il y a un petit côté Rouletabille, l’enquêteur de Gaston Leroux, dans la dernière fournée* de Jérôme Attal, un côté farceur, sacrément romantique, diablement joyeux.
Ainsi voici notre Rouletabille – de son vrai nom Joseph Joséphin, fils de Joe J. dans le livre (comme c’est bizarre) – qui part à la recherche d’un baiser ou plus exactement d’une jeune sonneuse de cloche qui aurait donné un baiser à François-René de Chateaubriand, à son insu, en 1793, lequel baiser, comme un tintement, est évoqué dans Les Mémoires d’outre-tombe, au livre X. On l’aura deviné : cet incertain et doux souvenir est prétexte à Jérôme pour développer une comédie romantico-historique, truffée d’espiègleries langagières, ainsi ce « Je vous aime puisque vous êtes aimusant » (page 245), ou cette discussion entre un modèle du peintre Boudin et un autre de Monet : « Votre robe ne vous boudine pas trop ? – Et la vôtre, c’est un emprunt ou vous l’avez payé avec votre propre Monet ? » (page 169) ou encore ce : « Ne me dites pas qu’en France vous ne connaissez pas Gog et Magog ? – En France, je ne connais que des démagogues » (page 123) ; un livre léger, virevoltant, comme le fut Les mariés de l’an II, le film du formidable Jean-Paul Rappeneau, le tout ici ponctué de gracieusetés : « En amour, toute demande d’explication est prise pour une plainte «  (page 116) et « On retient pour toujours ce qui nous échappe à jamais » (page 195). Bref, La petite sonneuse de cloches est un hommage fiévreux de l’amour de son auteur à l’imagination et à l’univers des romans, là où, précise-t-il dans ses remerciements, tout à coup sérieux comme un Pape, il « loge tout son cœur ».

*La petite sonneuse de cloches, de Jérôme Attal. Éditions Robert Laffont. En librairie le 22 août 2019. Rentrée littéraire 2019.
Le titre de cette chronique est extrait de la chanson « Le baiser » de Alain Souchon (Virgin).