Archive | octobre, 2021

Les enfants réparés.

Formidable titre emprunté à L’Aigle noir de Barbara dont je découvre dans le livre* de Charlotte Pudlowski qu’il est un texte sur l’inceste qu’aurait subi la chanteuse, Un beau jour, ou peut-être une nuit/Près d’un lac je m’étais endormie/Quand soudain, semblant crever le ciel/Et venant de nulle part/Surgit un aigle noir. Bref. Ou peut-être une nuit est un formidable document qui fait suite au podcast du même nom, créé par Charlotte après que sa mère lui ait appris avoir elle-même été victime d’un inceste. Depuis, elle n’a de cesse que de comprendre et surtout recueillir la parole des autres, leur donner une voix, porter à la lumière les ombres de la honte et du chagrin et arrêter de glisser les cendre des corps dévorés sous les tapis du déni. 
Je me souviens avoir écouté son podcast et j’avais été frappé par la beauté des voix des victimes, ces anciens enfants ; leurs mots comme des chants de douleur. Et donc de beauté.

*Ou peut-être une nuit, de Charlotte Pudlowski. Éditions Grasset. En librairie depuis le 29 septembre 2021. 

Inestimable, ça a un prix.

Les livres d’Anne-Marie Revol lui ressemblent et celui-ci* n’échappe pas à la règle. Il fonce, déborde de mots comme d’amour, transporte, traverse un siècle, une vie, cent vies. Il y a dans ces pages quelque chose de virtuose comme un trapéziste dont on croit que la dernière figure était la plus belle, la plus étonnante et voilà qu’il en présente une autre, et encore une autre et que nos yeux de lecteurs redeviennent des yeux d’enfant. Anne-Marie est une grande conteuse.
La voici qui nous narre l’histoire de Prudence, la grand-mère qui offrit des cadeaux inestimables à chacun de ses petits enfants pour leur 7 ans. Sept cadeaux incroyables qui modifieront probablement le cours de la vie de chacun et surtout nous entraînent, nous, dans l’odyssée de cette femme qui avait le cœur à gauche et l’amour au centre. Une vie inestimable est une histoire comme on n’en raconte plus, qui donne des envies de vie et nous aventure hors du commun — pour vingt petits euros seulement. Ça, c’est inestimable.

*Une vie inestimable, d’Anne-Marie Revol. Aux éditions Lattès. En librairie depuis le 13 octobre 2021. 266 pages, 20 euros, soit 0,07518797 euro la page.

Fifty shades of Parillaud.

Ceci dit, une fois passées les nombreuses pages « coquines » de ce roman qui, précise d’entrée Anne Parillaud, n’a rien à voir de près ou de loin avec la réalité, il s’avère que Les Abusés* narre l’histoire d’un couple incandescents, lui, peintre mondialement reconnu, elle, actrice au prénom d’Adélie (contraction d’Alain et Delon ?) qui se hait, s’aime, se déchire, se retrouve et baise beaucoup — elle au prétexte qu’elle aurait été abusée dans son enfance et ne connaisse que cela comme langage; le tout dans une écriture comme une bombe à fragmentation de mots. C’est en tout cas, ce que j’ai compris. Mais peut-être me trompé-je…

*Les Abusés, de Anne Parillaud. Éditions Robert Laffont. En librairie depuis le 22 avril 2021.

La femme qui murmurait à l’oreille des vivants.

N’en déplaise aux mauvaises langues, le succès n’est pas toujours synonyme de médiocrité, en voici une preuve de plus avec ce formidable récit* de Delphine Horvilleur, rabbin, dont le métier, lorsqu’elle n’écrit pas, est d’accompagner les morts, et donc les vivants, jusqu’à leur dernière demeure. Ainsi nous parle-t-elle d’eux, aide-t-elle à accepter leur départ, à apprivoiser les fantômes à venir. Au travers de onze morts, elle raconte onze vies, onze éternités, onze façons d’aimer la vie, et, en plus de nous apprendre des choses formidables, elle éloigne notre peur. Un livre important, une femme immense.

*Vivre avec les morts, de Delphine Horvilleur. Éditions Grasset. En librairie depuis le 3 mars 2021.