Archive | juin, 2024

Chick lit place Vendôme.

Aimée, la mère d’Agathe, meurt d’une crise cardiaque.
Agathe, 34 ans, découvre alors chez sa mère des lettres d’hommes et des bijoux.
Aimée était très aimée. 
Et très gâtée.
Les bijoux sont signés Van Cleef & Arpels et valent leur pesant de cacahuètes.
Agathe, du nom d’une pierre, cherche alors à rencontrer ces généreux amants donateurs de bijoux, espère peut-être que l’un d’eux est son père.
Elle pénètre le monde fascinant des bijoux. Celui moins fringant des hommes.
Et voilà qu’elle rencontre un bel belgo-indien.
On est alors page 228 — car tout cela prend du temps —, elle pense : « J’aimerais tant cesser d’être prudente » et, page 263, elle cesse enfin d’être prudente : « Elle presse alors finalement légèrement la main d’Ashok avant de se tourner vers lui ».
À la fin, elle a un papa, un amant, et se dit, page 285, la dernière du livre, qu’elle « est au début d’une magnifique histoire ».
Bref, à l’heure des livres militants, féministes, anti-truc et muche, Carat* est un délicieux ovni.

*Carat, de Marie Charvet, aux éditions Grasset. En librairie depuis le 3 avril 2024.

Pourquoi n’avais-je jamais lu Izzo ?

Et voilà qu’une amie lectrice m’offre la trilogie de Jean-Claude Izzo, Total Khéops, Chourmo et Soléa. À la faveur d’un déplacement à l’étranger, heures d’attente dans les aéroports, j’ouvre le premier tome * et tombe immédiatement sous le charme violent de l’écriture, l’incandescence de Marseille, l’urgence de vivre ou en tout cas de ne pas mourir. Voilà que je replonge dans tout ce que j’aimais chez Lawrence Block et plus tard chez Michael Connelly (des débuts), un vrai roman noir, roman comme dans littérature et noir comme dans âme humaine. Voilà que je découvre un héros comme on les aime, c’est-à-dire pas du tout un héros, mais un homme avec ses clopes, sa bibine, son immense amour des femmes et son incapacité bouleversante à en garder aucune, un flic qui tiendrait à la main son cœur comme une arme. Et c’est déchirant.
Quant à ceux qui préfèrent le côté policier du roman noir, il y a des meurtres pourpres et un viol bien moche, une immondice sur l’immondice des hommes.

*Total Khéops, de Jean-Claude Izzo, Folio Policier. 

Dessine-moi un roman.

« Un premier roman » nous précise, en orange fluo, le bandeau de couverture. Mais le onzième livre de son auteur. C’est dire qu’au rayon des mots (et des dessins puisqu’elle est auteure de bédé), elle en connaît un rayon. 
La voici qui délaisse, le temps de 113 pages, son cayon de papier pour un clavier ou un stylo bille et nous offre Du même bois, un roman écrit comme on dessine, dessiné comme on croque, croqué comme on broie. Car chez Marion Fayolle l’écriture est avant tout une langue, celle de ses personnages, fermiers de génération en génération, tous faits du même bois, des mêmes mots, de la même façon de regarder le monde — celui qui s’arrête à l’enclos, celui qui s’éclaire parfois des lampions du même bal et se réveille aux même beuglements de génisses. Une langue imagée (logique quand on est dessinatrice), haute en couleur, capable de merveilles absolues, belles comme des tableaux. Il y a quelque chose de sublimement désespéré dans ce bref roman — de ce désespoir poétique qui fait de chaque brin de lumière la vie même, comme les champs d’un certain van Gogh ou les ciels d’un certain Turner.

*Du même bois, de Marion Fayolle. Éditions Gallimard. En librairie depuis le 4 janvier 2024. Prix Marcel Pagnol 2024.

Un jour s’est levé.

Je voudrais revenir sur Un jour viendra couleur d’orange, paru chez Grasset en 2020, car voilà que m’a été envoyé ce matin le livre audio qu’en ont fait des élèves du Lycée Victor Hugo d’Hennebont (56700). C’est extraordinaire et je ne peux résister à la joie de vous le partager. Alors merci à chacun, chacune de vous de faire d’un livre un tel chant.