
Les années 60. Le Nord de la France. La campagne. Des odeurs de printemps et de purin. La ferme. Le temps qui s’étire et baille et tourne parfois à l’orage ou aux brûlures du soleil. Des poules, des vaches et du lait. Des corps forcis, fatigués déjà. Et dans cette pastorale, deux enfants, deux frères, François, 4 ans, Francis, 7 ans, et un jour une automobile écrase le petit. Pas de cris, pas de hurlements ; une fatalité grise, juste un petit corps sur un petit lit, puis sur un petit lit d’hôpital, puis dans une petite boite, et voilà le cœur du petit survivant qui grandit, grandit, pour y accueillir le souvenir de son petit frère, faire place à cette vie dans les champs qu’ils se promettaient, y ranger les mots des grands qu’on comprendra un jour, comme mort et comme mot — juste une lettre d’écart —, comme disparu, comme chagrin. Et c’est le Francis de soixante ans qui écrit aujourd’hui cette tragédie lointaine, le silence des arbres encore, le parfum oublié des tilleuls, lui, le survivant, l’écrivain, Francis Grembert qui, à son tour, bèche le plus beau des jardins du souvenir à son petit frère.
*Les deux tilleuls, de Francis Grembert, aux éditions Arléa, coll La rencontre. En librairie depuis le 2 janvier 2025. Prix du livre court 2025. Prix Cazes 2025.