Voix sans issue.

Voilà donc un roman noir*. Un vrai de vrai. Noir de noir. Désespérément désespéré. Une cité, bien sûr. Des loulous. Des dealers. Des gamins qui s’emmerdent à cent sous de l’heure. Qui rapinent. Fument. Clopes. Shit. Codéine. Morphine. Les reins en capilotade. La chiasse. Les apparts qui schlinguent. Des voisins qu’écoutent la télé à fond. Le centre commercial. La chourave. L’absence de rêve. Aucun rêve dans aucune tête dans ces Yeux Fumés. Que du gris charbon. Du noir, on vous dit. Et puis des filles. Il y en a un paquet qui a du se barrer, car ici ne restent que les débiles ou les grosses. Ici, elles sont faciles. Elles baisent qui veut. Sucent à tour de bras (si je puis dire). Le sexe triste, à toutes les pages. À tous les étages. Jamais de tendresse. Ni de caresse. Juste une violence sourde. Une envie d’engluement. De chute. De poubelles. Nathalie Sauvagnac – dont le nom claque comme sauvage, claque comme claque –, nous offre un roman terrible. Un roman inconsolable. Une impasse. Une voix sans issue (j’écris voix à dessein). Le portrait d’un gamin rongé par un mal mystérieux. Mortel. Celui de la France d’aujourd’hui, peut-être. De la misère qui ne féconde plus que de la misère. Peut-être suis-je trop vieux pour n’être que cynique, mais il me plaît encore de croire qu’il y a un horizon à chaque vie, même si pour les héros de Sauvagnac, cet horizon c’est le rien.

*Les yeux fumés, de Nathalie Sauvagnac. Éditions du Masque. En librairie depuis le 9 août 2019.