Un manuscrit qui tue.

Revoilà enfin Antoine Laurain, vingt-et-un mois après son Millésime 54 1, avec un manuscrit jubilatoire, Le Service des manuscrits 2 mais qui, en réalité, s’appelle Les Fleurs de sucre, lequel manuscrit arrive au service du titre de celui-ci, enthousiasme toute la maison d’édition, qui s’empresse de contacter l’auteur, mais voilà que l’auteur n’a donné qu’une adresse mail, qu’il ne répond que rarement ou très brièvement, le livre est publié à la Rentrée Littéraire et badaboum, le voici parmi les quatre finalistes du Goncourt, et toujours pas d’auteur sous la main pour aller récupérer le prestigieux prix place Gaillon, si d’aventure le roman l’obtenait.
Jusque là tout va bien.
Là où les choses prennent un tour simenonien c’est que, parallèlement à ces joyeuses nouvelles littéraires, sont découverts deux corps assassinés, bientôt un troisième. Puis un quatrième, mais chut. Et voilà que l’enquêtrice (qui rime avec lectrice), tombe sur Les Fleurs de sucre et y lit, ahurie, la description des crimes sur lesquels elle travaille. Et là où les choses se compliquent vraiment, c’est qu’en l’absence d’auteur comment explique-t-on que ces crimes soient décrits dans un livre avant même qu’ils aient été commis ? Eh bien la réponse se trouve dans le grand art d’Antoine : la malice – au sens où elle est « la tournure d’esprit de celui la personne qui prend plaisir à s’amuser aux dépens d’autrui ». Et autrui, c’est nous. Donc Antoine nous balade le long de ces rives littéraires3 et criminelles, deux rives tout aussi dangereuses l’une que l’autre. Nous manipule. Et nous, émerveillés, on en redemande.

1. Millésime 54. Éditions Flammarion (2018). Et en J’ai Lu le même jour que Le Service des manuscrits. Malin.
2. Le Service des manuscrits, de Antoine Laurain. Éditions Flammarion. En librairie le 8 janvier 2020.
3. À ce propos, la description des repas éditeurs/auteurs est un régal.