Tout est bien qui finit bien.

Dieudonné 2

Voici un auteur* au prénom d’un titre d’une chanson de Christophe, période « Ne raccroche pas » (pas la meilleure, pour preuve : Allo Stéphanie, ne raccroche pas/C’est samedi, je passais par là/Près du Palais, je t’offre un verre), au nom d’un comique troupier à l’humour suspect et qui raconte une histoire dans laquelle on trouve un père chasseur, alcoolique et violent, il y a des alcooliques mous mais lui bat sa femme qui elle-même ressemble à « une forme de vie primitive, unicellulaire, vaguement translucide » (page 12), un petit frère qui tue les chats du quartier depuis que le marchand de glace s’est explosé la gueule avec une bombonne de chantilly, puis se met à dépecer les chiens quand il n’y a plus de chats (la meilleure école pour finir en serial killer sur Netflix), et une narratrice qui n’a pas de nom, grande sœur du petit frère, fille de l’ivrogne et de l’amibe, qui rêve de remonter le temps depuis qu’elle a vu Retour vers le futur, de retourner au moment d’avant l’explosion de la tronche du glacier qui a eu pour effet collatéral de rendre le petit frère méchant, bref une palette de vies toutes chiffonnées qui annonce le pire. Nous sommes dans un lointain cousinage avec la Darling de Jean Teulé, la violente noirceur en moins, car l’écriture légère, faussement désinvolte d’Adeline Dieudonné, en un mot brillante, parvient à nous faire croire, malgré de drôles d’horreurs ici et là, que tout est bien qui finit bien. Le méchant perd. Les petites victimes ont une deuxième chance. Et comme un bonheur ne vient jamais seul, l’auteur se fait un nom. Son roman* fait un tabac. Il remporte deux prix, l’un décerné par 800 personnes (le Prix Fnac), l’autre par 200 lycéens (vingt par établissement selon le très sérieux règlement du concours, dont celui que fréquenta Théophraste Renaudot). Son éditrice sourit, même quand il pleut, quelle joie. Et à Brive, Delphine de Vigan, aux anges, l’invite sur scène. Chaque saison littéraire réserve une ou deux magnifiques surprises qui sont la preuve qu’il faut continuer à croire aux miracles.

*Adeline Dieudonné. La vraie vie. Éditions L’iconoclaste. En librairie depuis le 29 août 2018. Prix Fnac 2018. Prix Renaudot des Lycéens 2018.
**Darling, de Jean Teulé. Éditions Julliard puis Pocket.