Les caprices d’un astre.

Dans ses romans, comme dans ses films Hitchcock avait son MacGuffin, Antoine Laurain a recours à un objet transactionnel. Il peut être un chapeau (Le Chapeau de Mitterrand), un carnet (La femme au carnet rouge), un manuscrit (Le service des manuscrits), une cassette audio (Rhapsodie française), une bouteille de vin (Millésime 54) et à présent un télescope (dans ce nouveau Les Caprices d’un astre*). Ces objets lui permettent de donner corps à sa fantaisie romanesque mais surtout de se téléporter, si je puis dire, dans l’univers qu’il souhaite conquérir — aujourd’hui la comédie romantique. Oui, une histoire où un homme tombe amoureux d’une femme qu’il a fort peu de chances de conquérir mais dont l’issue fait peu de doutes car le genre repose sur l’impérieuse nécessité d’un happy end. 
Mais là où Laurain est épatant et diablement réjouissant, c’est qu’il redessine les contours de cette comédie amoureuse de façon tout à fait inattendue, en reliant, via le fameux télescope, deux histoires d’amour, plus exactement d’attractions (le double sens du titre prend ici tout son sens) : la chimérique — celle de l’astronome Guillaume Le Gentil de la Galaisière pour Hortense, au dix-huitième siècle, et l’imprévisible — celle de Xavier Lemercier pour Alice Capitaine 250 ans plus tard.
Mais n’en révélons pas davantage, car dans l’amour, c’est le chemin qui compte.
Les Caprices d’un astre pourrait tout à fait être la rencontre jubilatoire du chevalier de Rackham le Rouge d’Hergé et du Jeff Jefferies (James Stewart) de Fenêtre sur cour du vieil Alfred. Il est surtout la démonstration du talent d’Antoine Laurain à se jouer de tout.
La malicieuse audace des grands conteurs.

*Les Caprices d’un astre, de Antoine Laurain. Éditions Flammarion. En librairie (et sur liseuse) depuis le 12 janvier 2022. Tous les livres cités sont publiés chez Flammarion.