
Revoici Laurence Tardieu avec un texte* qui lui ressemble profondément — beau, élégant et précieux.
Vers la joie évoque la leucémie de son petit garçon, sa rémission, mais surtout, et c’est ce surtout qui compte, les empêchements collatéraux que la maladie du fils a occasionnée sur la mère. Si le temps de la lutte a été innommable, écrit-elle, le temps de l’après-lutte l’est tout autant.
Et ils sont là, la beauté, l’élégance et la préciosité de ce texte ; dans cet effondrement souvent tu, dans cette dégringolade de soi en son propre corps, dans le désaxement dans sa propre temporalité, lorsque le passé ne raconte soudain plus la même chose et que le futur n’a pas vraiment de sens. Alors lentement, par la grâce de l’écriture, par cette foi immense que Laurence porte en elle, jusqu’à l’aveuglement — et certains aveuglements montrent, indiquent — elle essaie de remonter la pente, de retrouver l’odeur des choses, la couleur verte d’une herbe d’enfance, la taille de la main d’une mère à l’aune de sa main de petite fille.
Désespérément retrouver la joie.
Il y a un mot dans ce magnifique livre qui résume à lui seul cette remontée des abysses, précisément un verbe, mais tellement banal, tellement anodin et galvaudé qu’il faut être fort vigilent pour l’apercevoir, audacieux pour le retenir et longanime pour le laisser infuser en nous, jusqu’à ce qu’il nous éclaire et nous éclaire le monde. C’est aimer.
*Vers la joie, de Laurence Tardieu, aux éditions Robert Laffont. En librairie depuis le 9 janvier 2025.